Lecture de qualités de processus dans la cristallisation

Lecture de qualités de processus dans la cristallisation

28 janvier 2024 Vesna Forštnerič Lesjak 1481 vues

« Cristallisation dans la recherche fondamentale pour une meilleure compréhension des médicaments à base de plantes » : ce projet souhaite, grâce à l’armoise, rendre accessible l’évaluation des cristallisations.


Il y a exactement cent ans, en 1923, Lili Kolisko (1889-1976) s’attaquait au problème posé par Rudolf Steiner, « Étudiez les forces créatrices chez les plantes », avec la cristallisation de sucs végétaux.[1] Elle associa et remania son travail précédent (recherches sur la dynamisation d’organes végétaux au stade de la germination) à partir de la chromatographie et de multiples expériences avec différents sels métalliques, en utilisant la méthode de « dynamolyse capillaire ». Connue aujourd’hui sous le nom de « cristallisation sensible », elle fait partie des méthodes de création d’images. Les questions de Lili Kolisko portaient sur l’agriculture, l’astronomie, la médecine et la pharmaceutique.

Après cette impulsion, la recherche se poursuivit de manière prometteuse dans différentes directions, avec des chercheurs comme Ehrenfried Pfeiffer, Agnes Fyfe, Magda Engquist, Maja Mewes et Rudolf Hauschka, jusqu’aux auteurs actuels comme par exemple Ruth Mandera[2], Hans-Joachim Strüh[3], [4] et Beatrix Waldburger[5].

Acquérir des compétences en matière d’évaluation

Le travail et la méthode elle-même ont été développés par plusieurs instituts (Institut de recherche au Goetheanum, Strömungsinstitut Herrischried), des associations de recherche (Verein für Krebsforschung Hiscia, avec Paul Doesburg par exemple), des entreprises (Wala et Dr Hauschka) et de nombreux chercheurs individuels. Ainsi, les limites de connaissance qu’offre la méthode dans le domaine de la qualité et de la vitalité des sucs sont devenues plus claires et ont pu être analysées de manière critique.[6] Les cristallisations sont en général reproductibles, même si leur évaluation difficile nécessite une formation approfondie pour pouvoir entrer dans la comparaison qualitative des images de façon objective et néanmoins vivante. Il est possible, grâce à certains critères d’évaluation et/ou de séries ou types de références déjà établis, de trouver des repères aisés dans les cristallisations sensibles. L’approche des images produites exige du chercheur d’une part l’intensification de sa relation avec la nature et, d’autre part, le développement d’une pensée vivante et flexible, à commencer par le goût et l’odeur des extraits, l’observation de leur couleur, de leur texture et d’autres propriétés.

La méthode de cristallisation sensible n’est pas une méthode analytique ; plutôt que de montrer les substances présentes dans les sucs et leur concentration, elle met en évidence les transformations des substances à plusieurs niveaux lors du processus de transformation. La méthode n’est en fait applicable qu’en accompagnement d’un processus et il en résulte un langage pour la modification qualitative de substances.

Pour la pharmacienne que je suis, la cristallisation constitue un enrichissement supplémentaire qui me permet d’avoir une vision plus profonde de la modification des organes des plantes au cours de l’année. Même dans les organes tels qu’un tubercule de plusieurs années qui, extérieurement, ne change guère en un an, il se passe durant ce temps énormément de choses en relation avec les organes aériens ; on peut s’en rendre compte par le changement de couleur et de forme, ainsi que par la dynamique, l’harmonie et le caractère esthétique de l’image. J’ai pu, grâce aux cristallisations, mieux déterminer la période optimale de récolte ou justifier la sélection des organes de la plante lors de nouveaux stades de développement. En effet, les images obtenues ont par exemple permis de voir jusqu’où s’étend l’impulsion de la floraison dans d’autres parties de la plante au moment de la formation de la fleur.[7], [8] J’ai également pu suivre la transformation des sucs par des processus pharmaceutiques, ce qui est d’une grande importance pour la composition de remèdes.

La recherche sur Artemisia

En mars 2024, nous commencerons dans le cadre de la section (et à l’avenir, en lien avec d’autres instituts et chercheurs, éventuellement aussi des entreprises) un projet de recherche, d’abord quinquennal, autour de l’armoise. À l’aide de six espèces de plantes médicinales de ce genre, nous suivrons, à travers les cristallisations, les changements principalement présents au niveau des feuilles dans leur phase végétative et générative, et nous les comparerons avec les représentants d’autres genres et familles de plantes amères. Le but est également de nous rapprocher de la compréhension des substances amères et des tanins en tant que « processus arrivés à leur terme ».

Par ailleurs, nous nous pencherons sur des questions pharmaceutiques en faisant des recherches sur les processus aqueux, comme la préparation de macérats, d’infusions, de digestifs et décoctions, et sur différents solvants et leur concentration. Nous sommes confrontés à des questions importantes dans le domaine de la médecine anthroposophique et de ses médicaments, qui concernent précisément leur qualité dans un cadre précis.

La qualité comme objet de recherche

D’importantes analyses doivent être réalisées. Il nous faut également créer et documenter des bases pour les critères de qualité des médicaments anthroposophiques. La qualité est considérée comme le principe premier des médicaments anthroposophiques, mais elle a été peu étudiée. Dans le cadre du projet, quelques matériaux seront élaborés qui permettront de documenter de manière comparative de telles différences de qualité. Nous espérons ainsi apporter une contribution à l’avenir de la médecine anthroposophique.


Notes

1. Eugen et Lili Kolisko, Landwirtschaft der Zukunft, 1953.
2. Ruth Mandera, Zur Metamorphose von Pflanzenorganen, Substanzqualitäten und Bildtypen im Steigbild, Jahrbuch für Goetheanismus, 1995.
3. Hans-Joachim Strüh, Zu den stofflichen Verhältnissen und zur zeitlichen Entwicklung von pharmazeutischen Prozessen, Jahrbuch für Goetheanismus, 1995.
4. Hans-Joachim Strüh, « Grundlegende Phänomene bei der Ausbildung der Steigbildformen. Bildtypen und pharmazeutische Prozesse » dans Elemente der Naturwissenschaft, 1987.
5. Beatrix Waldburger, Faszination Steigbilder, 2023.
6. Hans-Joachim Strüh, Die Steigbildmethode – ein kritischer und weiterführender Überblick, Jahrbuch für Goetheanismus, 2023.
7. Vesna Forštnerič, Jan Albert Rispens, « Begleitung dreier Zyklamenarten im Jahreslauf mit der Steigbildmethode » dans Der Merkurstab, 2014.
8. Vesna Forštnerič Lesjak, Patricija Šenekar, Wilde Karde und Borreliose – ein Brückenschlag. Ein goetheanistisch-anthroposophischer Erkenntnisweg zur Entwicklung neuer Heilmittel, Verlag Sapientia, 2024.

Dons
science.goetheanum.org/institut/projekte/steigbilder

Un siècle d’existence et des recherches en cours

L’École de science de l’esprit a été inaugurée lors du Congrès de Noël de 1923-1924. En préalable à la commémoration de cet évènement, la Direction du Goetheanum a documenté les projets de recherche actuels de l’École dans une brochure intitulée Einblicke. Certains de ces travaux, à commencer par ceux qui concernent des exercices de perception, sont présentés dans Anthroposophie aujourd’hui.
Sebastian Jüngel